samedi 27 février 2010

16) LA TRANSAT

30 novembre 2009 11 heures DEPART TRANSAT


Mindelo (Cap Vert) - Salvador de Bahia (Brésil) : 1980 MN



Voilà c’est parti, les amarres sont larguées pour environ 15 jours.

Deux semaines seuls sur notre bateau au milieu de l’Atlantique, quelle aventure!!

La mer n’est pas très amicale pour notre départ, elle est très houleuse. De quoi se mettre dans l’ambiance tout de suite, mais normalement cela devrait se calmer car la traversée de l’Atlantique à cette période de l’année ne pose généralement pas de problème.

Nous avons décidé de faire route avec le bateau Mahesadry afin de pouvoir s’entraider en cas de problème. Nous serons ainsi en contact VHF permanent.

Les quarts s’organisent à bord. Je prendrai le premier quart de 20h à 23h car je suis incapable de dormir si tôt, puis ce sera Marc de 23h à 2h du matin, et vient ensuite celui de 2h à 5h qui est le plus difficile pour moi et Marc reprend le relais de 5h à 8h. Alexy nous accompagne souvent pour le premier et dernier quart ce qui nous permet de somnoler.

Durant toutes les navigations nous avons pris l’habitude de dormir dans le cockpit afin d’être prêts pour une éventuelle manœuvre.

Trois heures passent finalement relativement vite. Le ciel est étoilé et on ne se lasse pas de l’observer dans l’attente de voir une étoile filante, un bon livre à lire et de la bonne musique , que demander de plus? Les cargos se font rares, cela nous change de Gibraltar.

Nous commençons rapidement à pêcher (dorades coryphènes, thon, bonites) Il faut dire que nous avons à notre bord deux très bons pêcheurs qui nous assurent du poisson frais à chaque repas, c’est vraiment impressionnant! Nous ne manquerons pas de protéines durant cette traversée.


La vie s’organise tranquillement à bord. Afin d’économiser l’eau nous prenons l’habitude de nous doucher avec des seaux d’eau de mer et nous nous rinçons ensuite à l’eau douce. Nous n’avons pas de dessalinisateur et possédons 400 litres d’eau dans nos réservoirs. La vaisselle se fait également à l’eau de mer et rinçage à l’eau douce. En revanche nous buvons de l’eau minérale. Nous devrions donc arriver à Salvador de Bahia sans souci d’eau.

Je suis vraiment impressionnée par le pouvoir d’adaptation de l’être humain à certaines conditions de vie. Au bout de quatre jours de navigation chacun vaque à ses occupations comme s’il était à terre (cuisine, pâtisseries, lectures, leçons, vidéos etc…) et les journées passent très vite. Plusieurs amis ayant déjà fait la transat me l’avait expliqué, mais j’avais du mal à imaginer que j’arriverai à m’y adapter si facilement.






Mis à part quelques journées de houle nous sommes capables d’effectuer de nombreuses tâches journalières. Nous conservons notre option Est décidée au départ avec de nombreux bateaux pour éviter d’être trop au près une fois dans l’hémisphère sud mais d’après les mails envoyés quotidiennement par l’organisation avec les positions de chaque bateaux, nous constatons que cette année c’est l’option ouest qui a payé. Nous avions une chance sur deux de gagner et nous avons perdu. Ce n’est pas bien grave nous perdons seulement une journée et nous sommes si bien en mer… Loin de toute l’agitation, contraintes et soucis des terriens.


Au fur et à mesure que nous approchons de la ZIC (zone intercontinentale de convergence) située de part et d’autre de l’équateur, le vent commence à mollir et nos moyennes journalières diminuent. Des périodes de pétole (nous aurons deux jours de moteur) vont alterner avec des passages de grains accompagnés

de vents violents.


Lorsqu’un grain arrive nous sortons le shampoing afin de profiter de cette eau douce et lorsqu’il y a pétole on sort les guitares, le clavier et en avant la musique….

En revanche nous ne pouvons plus dormir dans le cockpit car le temps de sommeil est déjà court alors si en plus il faut être réveillé par un grain cela ne va plus!!!

Aujourd’hui 8 décembre 2009 c’est le grand jour : nous allons passer dans l’hémisphère Sud. Nous avons rendez-vous avec Neptune. Marc qui a déjà passé l’équateur une fois a le droit de nous baptiser. Alexy et moi-même préparons nos costumes en cachette du Capitaine.

Alexy est très excité, il sera déguisé en pirate et fera offrande de quelques M§MS et Coca Cola à Neptune, quand à nous ce sera une coupe de Champagne.

A 16H23 nous franchissons la ligne, nous sommes contents d’être passé de jour car ainsi nous fêtons mieux l’évènement.

Et la fête continue car une demi-heure plus tard une ligne de pêche annonce un poisson, la ligne est tendue, ça a l’air d’être du gros!! Malheureusement il lâche rapidement. Tout le monde est déçu évidemment.


Mais alors que le soleil commence à se coucher le moulinet chante, un poisson a mordu. Tout le monde se met en place car chacun a son rôle dans ce cas.

Le Capitaine s’attache sur la jupe arrière, et commence à ramener le fil alors qu’Alexy met son gilet, s’attache et commence à mouliner. Quant à moi je suis la préposée pour préparer le crochet qui permettra de remonter le poisson et filmer l’évènement en live.

Je ne sais pas si c’est parce que nous sommes si proches de l’équateur mais cette fois c’est vraiment du gros!! Après plus d’une demi-heure de bataille, Marc remonte un Marlin de 1m30 et une trentaine de kilos. Alexy est surexcité, l’animal est aussi grand que lui, il ne s’attendait pas à une telle prise. Il se souviendra longtemps de son passage à l’équateur.
La fête est de courte durée car vers minuit nous voulons mettre un peu le moteur


afin de recharger les batteries. Cela faisait plusieurs jours que nous étions en autosuffisance au niveau énergie mais le manque de soleil de ces derniers jours nous oblige à recharger. Le moteur ne veut rien savoir, peut-être n’avons-nous pas été assez généreux avec Neptune pensons nous immédiatement!!

Malgré la nuit et une forte houle Marc se penche dans le moteur, c’est un problème d’arrivée de gasoil pense-t-il immédiatement. C’est vrai que le gasoil pris à Dakar n ‘était pas de bonne qualité et il a peut-être encrassé le filtre. Heureusement nous en avons en rechange, aussitôt changé le moteur redémarre: OUF!!! Mais une épaisse fumée se dégage à l’arrière, il fait trop nuit pour en voir la couleur, nous avons peur que ce soit un joint de culasse….

Au lever du jour, le Capitaine se remet à la tâche et décide de brancher l’arrivée de gasoil en direct dans un jerrycan où le gasoil est propre, cela fonctionne et après quelques minutes toute la fumée est évacuée. On souffle, ce n’est pas un joint de culasse, Marc rebranche le tout et victoire ça redémarre!!! Que d’émotions car qui dit plus de moteur, dit plus d’énergie au bout d’un moment et qui dit plus d’énergie dit plus de pilote automatique et plus de GPS!!


Mais tout va bien Mac Gyver, fidèle à son image nous a sorti de là.

Au bout de 8 jours nous avons du nous séparer avec Mahesadry car nous n’avions pas du tout les mêmes allures.

La deuxième semaine est donc plus triste, nous n’aurons plus de contacts VHF durant les 5 jours qui suivront. Ce n’est que trois jours avant l’arrivée que les bateaux se retrouvent dans un entonnoir et nous commençons à recevoir des contacts de : Dame Oui, Pilhoue V, Sagittaire, Bambi, Malika, Cigale ….

Un courant favorable nous accompagne le long des côtes quelques heures avant l’arrivée et nous arrivons plus tôt que prévu à Salvador de Bahia le 16 décembre 2009 à 16 heures. Nous sommes contents d’arriver de jour car découvrir la côte Bahianaise, ses plages, ses habitations avec un éclairage de fin d’après-midi est magnifique. Cela fait tout drôle de voir toute cette civilisation après 17 jours de mer.


Notre arrivée au ponton est encore plus MAGIQUE, les participants des bateaux déjà arrivés sont au rendez-vous, les pétards claquent, une Bahianaise en costume nous offre une caïpirihna( la boisson locale à base de Cachaça, citron vert et glace pilée) et une assiette de fruits tropicaux. Nous sommes contents de voir tout le monde et de pouvoir dire: « on l’a fait! ».Nous avons tout de même un petit pincement au cœur de quitter ce rythme agréable qui s’était installé à bord, ici la terre : fini le calme… Une semaine de plus en mer ne m’aurait pas dérangée.